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Thermalisme : Soins sacrifiés, territoires menacés

Publié le 20 novembre 2025
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La réduction annoncée du remboursement des soins thermaux dans le prochain budget de la Sécurité sociale menace à la fois une pratique médicale éprouvée et l’équilibre économique de nombreux territoires. Une décision présentée comme technique, mais dont les effets sanitaires, économiques et sociaux  pourraient être lourds et durables.

Le thermalisme n’est pas un agrément ni un service de confort. C’est un acte de soin, prescrit par un médecin, encadré par un forfait national et soumis à un suivi médical strict. Chaque cure s’ouvre et se clôt par un bilan de santé, et les indications sont clairement définies : rhumatologie, affections respiratoires chroniques, suites de traitements oncologiques, troubles métaboliques… des pathologies sur lesquelles les bénéfices sont documentés depuis longtemps.

Pourtant, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026 envisage de revoir à la baisse la prise en charge de ces traitements, y compris pour les patients en affection de longue durée, aujourd’hui remboursés intégralement.

Ce choix budgétaire, présenté simplement comme un vecteur d’économies, repose sur une vision réductrice du thermalisme. Les cures représentent moins de 0,2 % de l’enveloppe globale de l’Assurance maladie. À l’inverse, renoncer à ces soins risque d’orienter les patients vers des traitements alternatifs plus lourds et plus coûteux : médicaments pris au long cours, séances répétées de kinésithérapie, voire hospitalisations. Pour de nombreux patients chroniques, la cure constitue un complément thérapeutique efficace, souvent déterminant pour éviter une dégradation de l’état de santé, et une telle mesure pourrait donc coûter davantage que les économies espérées.

Mais le thermalisme constitue aussi un important levier économique dans de nombreux territoires. Autour des établissements, des centaines de millions d’euros irriguent chaque année l’hôtellerie, la restauration, les commerces, etc. Dans certaines communes, il représente l’un des principaux moteurs d’activité. Or 90 % des stations thermales se situent dans des villes de moins de 10 000 habitants : des territoires où chaque emploi compte, où la fermeture d’un établissement thermal pourrait provoquer une réaction en chaîne, entraînant la disparition de pans entiers de l’économie locale.

Le thermalisme n’est ni un luxe ni un vestige du passé, mais un maillon discret et essentiel de notre système de santé.

Le profil des curistes, lui aussi, rappelle ce qui est en jeu. Il s’agit souvent de personnes âgées, de patients souffrant de maladies chroniques ou de citoyens aux revenus modestes. En réduisant le remboursement, l’accès à la cure deviendrait sélectif, réservé à ceux pouvant assumer un reste à charge accru. Une fracture supplémentaire s’ouvrirait entre ceux qui peuvent se permettre de prévenir la dégradation de leur santé et ceux qui devront s’en remettre à des solutions moins efficaces et plus coûteuses. Pour de nombreux territoires déjà fragilisés, ce serait aussi un symbole de plus du retrait de l’État.

Moderniser le modèle économique du thermalisme, réfléchir à son organisation, l’adapter aux besoins contemporains : ces débats sont légitimes et doivent avoir lieu. Mais confondre réforme et recul serait une faute. Réduire ou supprimer la prise en charge des cures reviendrait à fragiliser simultanément un outil de santé publique reconnu, un levier de prévention encore sous-exploité et un secteur économique vital pour des dizaines de petites communes situées souvent dans des territoires ruraux isolés.

Le thermalisme n’est ni un luxe ni un vestige du passé, mais un maillon discret et essentiel de notre système de santé. Le menacer au nom d’ajustements comptables serait un calcul à courte vue, dont les coûts et impacts sanitaires, sociaux et territoriaux dépasseraient largement les économies affichées.

L’équipe de La République en Commun