Tribunes

Pour un socialisme populaire : une nouvelle doctrine pour le Parti socialiste

Publié le 05 juin 2025
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Alors que les militants socialistes doivent choisir aujourd’hui leur premier secrétaire, nous proposons dans ce texte une nouvelle doctrine pour que la gauche retrouve les classes populaires et moyennes sans lesquelles aucune victoire n’est possible.

Le Parti socialiste va mal. Le vote de la semaine dernière n’a fait que confirmer le déclin de la vieille maison, puisqu’il n’a mobilisé que 24 000 votants, contre près de 40 000 il y a sept ans. Ce déclin s’inscrit dans un contexte d’effondrement de la gauche, qui plafonne à 30% des voix même en additionnant le score de tous ses partis.

Si la gauche semble incapable de remporter une élection majeure, c’est parce qu’elle s’est coupée de son électorat historique. Bien sûr, le peuple de gauche ne revêt pas le même visage qu’au XXème siècle à la grande époque du syndicalisme. Mais nous en sommes arrivés à un point où celles et ceux pour lesquels nous nous battons, ces ouvriers, ces employés, ces agriculteurs, ces fonctionnaires de catégorie C, ne nous écoutent plus, ne votent plus pour nous et de plus en plus votent RN.

Il est temps que le PS retrouve sa raison d’être : la défense des classes populaires et moyennes. Sans cette boussole, le PS navigue à vue et est incapable de définir un horizon politique. Et sans une gauche capable de parler à la France périphérique, le pays de la Révolution emboîtera le pas aux Etats-Unis en se donnant à son tour à un candidat d’extrême-droite.

Ce tournant populaire passe d’abord par un réinvestissement des sujets économiques sur lesquels le PS est devenu inaudible. La naïveté des élites libérales face à l’hypermondialisation et leur complicité avec la financiarisation de l’économie ont conduit à un effondrement industriel et à un délitement social et territorial dont on voit aujourd’hui les effets. Face à l’échec de trente ans de politique de l’offre, il faut changer de stratégie économique pour refaire de la France une économie de production. La planification industrielle, la défense du made in France et du Made in Europe, le soutien à la recherche, le renforcement des compétences et de la formation doivent être nos priorités. Ce renouveau de notre tissu productif ne sera possible que si nous mettons fin à la concurrence déloyale par une orientation protectionniste, social-écologiste de notre politique commerciale. Cela se fera idéalement au niveau européen. Mais, vingt ans après le «  non » au référendum de 2005, il est temps que la gauche assume un bras de fer avec l’UE quand les positions de certains de ses Etats-membres sont autant contraires à nos intérêts.

Le PS doit redevenir le parti de la justice sociale. Soyons en phase avec les aspirations des gens : leur priorité n’est pas seulement une réduction du temps de travail mais aussi le renforcement du pouvoir d’achat, à commencer par celui des femmes toujours moins payées que les hommes, et l’amélioration des conditions de travail. De même, la focalisation sur l’âge légal de départ à la retraite, critère très important, ne doit pas paralyser le débat en faisant oublier qu’un ouvrier meurt en moyenne huit ans plus tôt qu’un cadre. Nous devons porter une autre réforme des retraites, qui permettrait aux ouvriers et employés de partir plus tôt que les cadres à taux plein, et bien avant 62 ans. Nous devons porter les grands sujets orphelins de la vie publique, comme le handicap ou encore les familles monoparentales.

Le socialisme populaire doit cesser de n’être qu’un souvenir pour devenir notre présent et notre horizon.

La gauche doit faire de l’écologie une grande cause populaire. Sans soutien du peuple, celle-ci continuera d’être battue en brèche. Privées de mesures d’accompagnement à la hauteur, les ZFE comme la taxe carbone étaient injustes car faisant porter l’essentiel des efforts sur les plus pauvres. Le PS doit défendre une énergie décarbonée à prix accessible pour les Français, avec une sortie ou une réforme du marché de l’électricité, ainsi qu’un développement massif des ENR. Par ailleurs, la clef de la transition écologique réside dans un changement radical de notre modèle d’aménagement. L’heure est à la péréquation, au renforcement des sous-préfectures, des villes moyennes et des villages. Cela sera possible en défendant les services publics, notamment de santé, les petites lignes ferroviaires et le commerce de proximité.

Enfin, il est temps que la gauche se réapproprie les questions d’ordre et de sécurité, trop longtemps délaissées au profit de l’extrême-droite et perçues comme taboues à gauche, alors que ce sont les classes populaires qui en sont les premières victimes. Cela doit être une de nos priorités.

Le tournant que nous appelons de nos vœux demande du courage politique. Mais ce changement de ligne est indispensable : le PS qui n’a pas su écouter les Gilets jaunes, qui préfère afficher un progressisme effacé et lisse qu’une ligne populaire, est voué à l’échec.

Changer exigera d’être exemplaire, en appliquant pour commencer la parité populaire dans nos instances et aux investitures, afin de redevenir un parti représentatif de la société. Cela passera par une formation permanente des militants, à travers des écoles de l’engagement. Cela passera également par un retour au concret, en faisant du PS un parti de services, notamment en tenant des permanences d’accès aux droits comme nous avons déjà commencé à le faire.

Le socialisme populaire doit cesser de n’être qu’un souvenir pour devenir notre présent et notre horizon. C’est sur ces bases que nous sommes déterminés à reconstruire un grand parti qui pourra faire gagner la gauche en 2027.

  • Nicolas Mayer-Rossignol, maire de Rouen, président de la Métropole Rouen-Normandie, premier secrétaire délégué du Parti socialiste
  • Hélène Geoffroy, maire de Vaulx en Velin, présidente du conseil national du Parti socialiste
  • Philippe Brun, député de l’Eure
  • Christian Assaf, vice-président de la métropole de Montpellier, président du groupe majoritaire à la région Occitanie
  • David Assouline, ancien sénateur
  • Lionel Benharous, maire des Lilas
  • Sarah Benhammou, membre du conseil national du Parti socialiste
  • Marie-Arlette Carlotti, sénatrice des Bouches-du-Rhône
  • Colette Capdevielle, députée des Pyrénées-Atlantiques
  • Carole Delga, présidente de la région Occitanie
  • Philippe Doucet, membre du bureau national du Parti socialiste
  • Lamia El Aaraje, adjointe au maire de Paris, première secrétaire de la fédération de Paris du Parti socialiste
  • Romain Eskenazi, député du Val d’Oise
  • Sandrine Floureusses, conseillère départementale de Haute Garonne
  • Jean-Marc Germain, député européen
  • Jérôme Guedj, député de l’Essonne
  • Jean-Paul Jeandon, maire de Cergy, président de l’agglomération de Cergy Pontoise
  • François Kalfon, député européen
  • Laurence Rossignol, sénatrice du Val-de-Marne
  • Laurence Rouède, vice-présidente de la région Nouvelle-Aquitaine
  • Gabrielle Siry, adjointe au maire du 18e arrondissement de Paris
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