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Pompiers : arrêtons de jouer avec le feu

Publié le 02 juin 2025
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Pompiers
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Pendant des années, le système français de sécurité incendie-secours a tenu bon grâce à un équilibre fragile : celui de 200 000 pompiers volontaires, animés par le sens du devoir, souvent prêts à quitter leur travail ou leur famille pour sauver des vies. Ce modèle, unique en Europe, est en train de vaciller sous nos yeux. Et avec lui, c’est la promesse républicaine d’égalité d’accès à la sécurité qui s’effrite.

Aujourd’hui, la pénurie est là. En 1973, la France comptait 388 pompiers volontaires pour 100 000 habitants. En 2023, ce chiffre est tombé à 293. Moins de bras, moins de présence, mais des missions toujours plus nombreuses, plus complexes, plus risquées, au moment où les soldats du feu deviennent «  les soldats du climat », comme le disait Grégory Allione, Président d’honneur de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France.

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pompiers volontaires pour 100 000 habitants en 1973
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pompiers volontaires pour 100 000 habitants en 2023
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sapeurs-pompiers volontaires en France
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sapeurs-pompiers professionnels en France

Le résultat est alarmant : les délais d’intervention explosent. En moyenne, il faut attendre 14 minutes et 48 secondes pour voir arriver les secours. Deux minutes de plus par rapport à 2014. En dernière position du classement européen. Le modèle du volontariat repose sur la conciliation entre vie professionnelle et engagement citoyen. Mais cette compatibilité est aujourd’hui devenue l’exception. Le volontariat sans moyens, sans reconnaissance, sans statut protecteur, devient une hypocrisie dangereuse.

Les volontaires doivent négocier avec leurs employeurs. Pendant ce temps, les 43 400 pompiers professionnels, sous-payés, épuisés, enchaînent les gardes, pour un salaire horaire souvent inférieur à 10 euros. Une profession qu’ils combinent pour la majorité avec le statut de sapeur-pompier volontaire, ajoutant de la fatigue à la fatigue. On ne protège pas un pays avec des héros précaires.

Prendre soin de celles et ceux dont c’est la vocation est une question de survie, mais aussi de choix de société : voulons-nous une République qui protège vraiment celles et ceux qui nous protègent ?

Prendre soin de celles et ceux dont c’est la vocation est une question de survie, mais aussi de choix de société : voulons-nous une République qui protège vraiment celles et ceux qui nous protègent ?

Il y a urgence. Ce modèle, autrefois objet de fierté nationale, devient une source de danger systémique. La Sécurité civile ne peut plus reposer sur la seule bonne volonté. De nouveaux moyens – terrestres et aériens – sont impératifs. Le pays doit atteindre l’effectif de 50 000 pompiers professionnels et recruter 50 000 volontaires de plus d’ici 2030, ce qui passe forcément par une revalorisation digne et une protection juridique solide. Il convient aussi de renforcer les avantages fiscaux pour les entreprises qui libèrent leurs salariés.

Il faut surtout rappeler que derrière chaque sirène qui met trop de temps à arriver, il y a bien souvent des vies en suspens.

L’équipe de La République en Commun