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Droits des travailleurs : recul mondial, alerte française

Publié le 05 juin 2025
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Dans la 12e édition de son indice des droits dans le monde, la Confédération internationale du travail (CIT) pointe une dégradation généralisée des droits des travailleurs y compris en Europe, qui connait la plus importante aggravation de toutes les régions du monde depuis dix ans. La France n’y échappe pas. Seulement sept pays sur les 151 de l’Indice ont reçu la note maximale.

Le dernier rapport de la Confédération syndicale internationale (CSI) est sans appel : les droits fondamentaux des travailleurs s’effondrent à l’échelle mondiale. Dans la 12ème édition de son indice des droits des travailleurs, la Confédération dresse un tableau sombre, sur lequel répression, intimidations, violation des droits fondamentaux et atteintes à la liberté syndicale deviennent la norme dans une majorité de pays. Le rapport pointe «  un véritable coup d’Etat contre la démocratie : un assaut concerté et persistant, mené par les entreprises et par les autorités publiques, qui menace la démocratie et porte atteinte aux droits et au bien-être des travailleurs. »

Au niveau mondial, les chiffres sont inquiétants :

0%
des pays violent le droit de grève
0%
ne respectent pas la négociation collective
0 pays
ont emprisonné des syndicalistes
0 militants
ont été assassinés pour avoir défendu leurs collègues

Avec l’arrivée de coalitions d’extrême droite au pouvoir, l’Europe n’est pas épargnée par ces attaques contre les droits des travailleurs : remise en cause du droit de grève, atteinte contre les représentants syndicaux, contournement de la négociation collective… L’extrême droite au pouvoir rime systématiquement avec dégradation des droits des travailleurs.

Si l’alerte est mondiale, ces atteintes aux droits des travailleurs sont également bien réelles en France.

Le pays ne figure certes pas parmi les pays les plus répressifs, mais le rapport souligne notamment la fragilité de la négociation collective, avec près de quatre conventions collectives sur dix imposées unilatéralement par les employeurs, sans représentation syndicale. Sont également pointés du doigt les atteintes à l’encontre de certains responsables syndicaux : « plus de 1 000 dirigeants syndicaux et membres de la CGT ont fait l’objet de poursuites au pénal et de mesures disciplinaires pour le rôle qu’ils ont joué dans les manifestations de masse contre la réforme des retraites. »

Le droit de grève, pourtant garanti par la Constitution, est de plus en plus remis en cause par des restrictions indirectes, une sémantique culpabilisante («  prises d’otage ») voire des pressions sur les salariés.

À cela s’ajoute une judiciarisation croissante des conflits sociaux, une mise en cause systématique de certains corps intermédiaires, affaiblissant l’équilibre démocratique du monde du travail.  Le rapport pointe aussi «  les limites imposées pour l’indemnisation des licenciements abusifs. »

La démocratie sociale est un pilier essentiel de la justice sociale et du pacte républicain.

Ce recul des droits ne se résume pas à des mots : il provoque des effets concrets. La perte de repères, la difficulté à se faire entendre et à défendre ses conditions de travail affectent le climat social. En France, cette fragilité se traduit entre autres par une crise silencieuse mais massive : celle de la santé mentale au travail.

Selon plusieurs études, dont celle d’Empreinte Humaine, près d’un tiers des salariés français ont déjà connu des signes de burn-out et près d’un salarié sur deux s’estime en détresse psychologique. La France se place ainsi parmi les pays européens les plus touchés par les dépressions liées au travail. L’absence de représentation, le sentiment d’impuissance et la solitude face à l’organisation du travail se révèlent des facteurs aggravants.

De telles situations ne sont pas acceptables au pays des Lumières et du « contrat social » : la démocratie sociale est un pilier essentiel de la justice sociale et du pacte républicain. Face à l’effritement des droits, la réponse ne peut être ni le silence ni le fatalisme. Elle doit passer par un renforcement des garanties collectives, une revalorisation du dialogue social, un soutien clair aux libertés syndicales et par des garde-fous législatifs pour protéger les travailleurs les plus fragiles notamment face à l’uberisation de pans entiers du marché de l’emploi.

Il ne peut y avoir d’épanouissement au travail sans des droits fermement établis et respectés pour toutes et tous .

L’alerte est mondiale. C’est une responsabilité collective de tenir bon sur l’essentiel : les droits des travailleurs, si chèrement acquis, ne sont pas des variables d’ajustement. Ils se défendent, sans relâche.

L’équipe de La République en Commun