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Carole Delga : « La crise actuelle n’est pas seulement agricole. C’est une crise de confiance, une crise démocratique »

Publié le 19 décembre 2025
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CD-lOpinion
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Par Emmanuelle Ducros

Carole Delga a répondu aux questions de l’Opinion concernant la crise de la dermatose nodulaire contagieuse qui frappe particulièrement l’Occitanie, et la colère des éleveurs. 

Quelle est la situation dans votre région, où des éleveurs sont touchés par la dermatose nodulaire contagieuse ?

Des axes routiers, autoroutiers, ferroviaires, ont subi ou subissent encore des blocages. Les circulations sont difficiles. Sur le front de la maladie, il n’y a pas de nouveau foyer ces derniers jours. Cette crise de la DNC prend une grande ampleur parce qu’elle touche un monde agricole qui, dans notre région, a subi, depuis trois ans, une accumulation de fléaux sans précédent. Toutes les épizooties ont frappé l’Occitanie : la DNC aujourd’hui, et avant cela, la grippe aviaire, la fièvre catarrhale ovine, la maladie hémorragique épizootique. Les agriculteurs ont aussi subi des sécheresses historiques et la vigne est en grande souffrance. Pour des exploitations familiales, d’une taille inférieure à la moyenne nationale, souvent fragiles financièrement, c’est dur. Ajoutez à cela la perspective de la signature du Mercosur, les agriculteurs occitans, qui ne voient pas de perspective d’embellie, sont passés de l’exaspération au désespoir.

Selon vous, cette crise va-t-elle au-delà du monde agricole ?

Ce que j’ai dit au Premier ministre, quand nous nous sommes parlé samedi dernier, et que j’ai répété dans une lettre ouverte, c’est que cette crise n’est pas seulement une crise agricole. C’est une crise de
confiance, une crise démocratique. Pourquoi tant de Français sont-ils du côté des agriculteurs ? Parce que ce qui leur arrive résonne en eux. Ils se sentent déclassés, ignorés, méprisés. C’est aussi la crise de ceux
qui se sentent loin de tout, face à un monde de plus en plus complexe, aux règles incompréhensibles. Nos concitoyens perçoivent cette gestion de crise comme un puissant symbole du fossé grandissant avec un pouvoir sourd, méconnaissant des réalités de vie et de territoires.

Sur le drame des agriculteurs se sont greffées des extrêmes qui attisent la colère, qui s’engouffrent dans le désarroi, avec des chefs de parti qui s’improvisent experts des décisions scientifiques. Je le répète : même si cela doit être expliqué, argumenté, c’est la compétence de l’Etat. Sur ce sujet de la confiance, de la considération, le gouvernement doit apporter de bonnes réponses. Ce qui se joue là, c’est l’avenir de la démocratie, de la République, la question de la vérité. Par la manipulation, on peut les faire tomber. Et les thèses complotistes que j’entends ces derniers jours, de la part d’élus, sur le fait que le gouvernement aurait intérêt à sacrifier l’élevage pour faire passer le Mercosur, doit réellement alerter. Le terreau est favorable aux populistes et, finalement, à une victoire électorale de l’extrême droite. La sortie de crise ne peut s’envisager que dans un horizon démocratique, avec une réelle considération des gens.

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C’est aussi la crise de ceux qui se sentent loin de tout, face à un monde de plus en plus complexe, aux règles incompréhensibles. Nos concitoyens perçoivent cette gestion de crise comme un puissant symbole du fossé grandissant avec un pouvoir sourd, méconnaissant des réalités de vie et de territoires
Carole Delga