Le nombre de morts dans la rue a encore progressé depuis un an selon le décompte du Collectif Les Morts de la Rue. Face à ces drames du quotidien, en soutien aux associations et en responsabilité, l’Etat et les collectivités locales doivent mobiliser des moyens pour construire des logements et reconstruire des vies.
Le 16 janvier, Gilbert 52 ans à Créteil. H, 3 ans, à Villeneuve la Garenne. V. 8 ans à Paris. Jessica 42 ans à Caen. Typhaine, 26 ans à Marseille. Amar, 56 ans à Pantin. Laurent 49 ans à Nancy. Le 7 février, Stanizlaw, 29 ans, à Montpellier. Arnaud, 46 ans à Vitré. Rachel à Avignon. Manjut à Melun. « Un homme de 46 ans » à Bagneux. Osei, 56 ans à Montargis. Colin 71 ans à Paris. Hamid, 43 ans à Hyères… La liste funèbre et glaçante établie par le Collectif des Morts de la Rue compte 855 noms depuis un an. 120 de plus qu’en 2023.
Hommage a été rendu ce 20 mai à Paris à ces 703 hommes, 112 femmes, 40 personnes au genre inconnu, 1 personne transgenre, retrouvés morts sous un porche ou un pont, sur une plage ou sur un banc, dans une tente ou une cabane de fortune. Certains n’ont pas d’identité, l’ont laissée au bout du monde ou au bout d’une autre rue dans une autre ville. Pratiquement tous ont quitté le monde des vivants dans la solitude qui a souvent noirci leurs derniers jours.
Face à ces 855 drames humains aussi malaisants que révoltants pour un pays développé comme la France, comment ne pas être envahis par un sentiment de culpabilité et même par la honte ? Il est trop facile de conclure que la vie leur a été ôtée par les infortunes de l’existence et la rigueur de l’hiver ou de l’été, il serait trop confortable de céder à l’impuissance et à la fatalité. Indifférence ou inaction : la responsabilité est collective.
Au terme d’une minutieuse enquête sur ces 855 décès, le Collectif des Morts de la Rue précise : « Durant les trois derniers mois avant leur décès, chacune de ces personnes a vécu majoritairement dans des lieux non faits pour l’habitation ou en hébergement d’urgence ou temporaire ».
Le Secours Populaire et France Terre d’Asile ajoutent : « Les préfectures, parfois des communes réquisitionnent des chambres d’hôtels, des internats sous-occupés mais ce n’est pas ainsi qu’on peut apporter le minimum de stabilité et remettre un sans domicile fixe dans un parcours de vie et de travail. Sans oublier les familles en extrême-urgence : plus de 3000 enfants scolarisés quittent tous les jours l’école sans avoir la certitude de dormir sous un toit le soir ».
Le Samu social, les professionnels et les bénévoles d’ONG humanitaires accomplissent jour et nuit un travail de terrain remarquable. Leur engagement et leur dévouement sauvent des milliers de sans-abri si l’on se réfère aux données de deux autres organisations, Emmaüs et le secours Populaire qui estiment à un demi-million la population de sans-abris dont 170 000 n’ont connu que la rue sur une année pleine.
Ces associations doivent être soutenues et encouragées, tant leur énergie et leur savoir-faire sont précieux. En revanche, la construction et de la rénovation de logements dédiés à l’urgence sociale, indispensables pour mettre fin à cette indignité, appartient aux pouvoirs publics. La réponse pour ces sans abri ne peut se limiter aux murs et aux toits. Ce sont bel et bien des vies qui doivent être sauvées et reconstruites.
Selon le Collectif, une majorité de ces personnes sans-abri souffraient de pathologies mentales, d’addictions, de maladies respiratoires « avec ou sans lien avec une rupture professionnelle, familiale ou un déracinement ».
Leur procurer un toit, des repas, leur apporter une assistance psychologique, administrative et médicale c’est un devoir d’humanité. Un grand pays comme la France n’a pas le droit de s’y dérober.
L’équipe de La République en Commun